2009 Études et explorations dans le siphon 2 de l’éven de Bez

Cet article est paru sur le site : http://www.plongeesout.com à la rubrique « Explorations » et dans la revue « Le Fil » n°21 de 2009 de la FFESSM.


Le Spéléo club de la Vallée de la Vis et le Groupe spéléo du Vigan ont repris depuis quelques années l’étude et l’exploration des réseaux de la vallée de l’Arre. Les premières furent nombreuses et la plus belle a permis d’ouvrir la grotte de Calles, un petit bijou. Mais ces réseaux, attaqués par l’aval, se retrouvent rapidement bloqués par des siphons.

Les explorateurs précédents, avares en informations et en topographies, ont contraint nos explorateurs à rechercher d’autres assistances. C’est dans ce contexte que je fus sollicité pour reprendre les plongées du siphon 2 de Bez afin de réaliser la topographie et de confirmer ou pas les théories élaborées sur la genèse du réseau.

A ce jour, deux plongées ont pu être réalisées malgré la programmation d’une dizaine de sortie. Mais les conditions climatiques et techniques nous ont contraint d’annuler souvent. Depuis ma première plongée, le 23 juillet 2008, il aura fallu attendre un an avant de retrouver des conditions acceptables. Le 4 juillet 2009, je suis à nouveau à Bez, avec cette joyeuse équipe de spéléos acharnés.

Qui dit siphon 2, dit siphon 1. L’essentiel de l’équipe n’étant pas plongeur et le matériel à transporter étant conséquent, l’équipe a opté pour le pompage du siphon. Démarrée la veille, la pompe permet de désamorcer en une vingtaine d’heures. Ensuite, le dernier plan d’eau est traversé en utilisant un câble inox où nous constatons qu’il ne reste que quelques torons. Même si la galerie semble horizontale sur la topographie, le portage jusqu’au siphon 2, environ 1 km, est particulièrement sportif. Jamais étroit mais toujours en diaclase plus ou moins large avec d’incessantes descentes et remontées. Il faut compter 2 à 3 heures de portage selon le niveau des équipiers. En revanche, l’arrivée au S2 est grandiose. La galerie prend l’allure d’un beau tunnel où serpente un petit actif sur un sol très travaillé par la corrosion : marmites, canyons, banquettes… et enfin la vasque du S2. Une pause est bien nécessaire avant de se mettre à reconstituer le matériel conditionné pour le portage. Afin de limiter le nombre de charges, 8 au total, j’ai opté pour une configuration un peu bâtarde que je regretterai.

Un recycleur Megalodon, un scooter DiveX et une redondance en ouvert avec un recycleur O2 type PVC. Ma plus grosse crainte est toujours d’arriver devant la vasque avec du matériel qui ne fonctionne pas suite à un mauvais coup lors du portage. Il est possible de bien emballer le matériel pour qu’il ne souffre pas mais le volume devient prohibitif et le nombre de charges s’envole. La précédente visite, nous avons du rebrousser chemin devant le siphon 1 car un problème de pompe n’avait pas permis de désamorcer. Ce petit aller-retour au siphon 1 avait eu raison de mon recycleur O2. Un coup avait pris en tenaille le faux poumon en chambre à air. Il n’était plus étanche…

Après une heure de préparation, me voilà transformé en wagon de marchandise. Même le scooter accuse le coup, il semble lui manquer deux pales sur les trois 😉 La visibilité est très médiocre. Des nuages laiteux stratifient le siphon. Je vois sur 3 ou 4 mètres. La largeur étant de 6 mètres, je ne vois pas toujours la paroi opposée. A deux cent mètres, première dépose, le recycleur O2, en bon état. Je reprends un peu le contrôle de mes mains pour pouvoir dérouler de 200 à 400 mètres un fil métré pour prendre le relevé topographique au retour. A 400 mètres, nouvelle dépose, une bouteille de Nitrox 40. La technique est simple. Je pose du fil métré à l’aller sur une zone connue et je reconnais la suite pour la séance suivante. Le scooter m’autorise à aller vite et loin. En quelques minutes, j’arrive à 600 mètres, -46m. Une grande diaclase coupe la galerie est autorise une remontée dans une belle cheminée. Je la prends jusqu’à -20M où les dimensions diminuent. Mes bulles d’équilibre détachent de l’argile du plafond. La visibilité se gâte sérieusement. Je redescends pour reprendre la galerie principale qui va toujours vers les 150° en descendant légèrement. Quelques mètres après, je trouve le terminus de M. Guis « 700 m » – 53 mètres. Son touret est encore là. Je l’attrape pour continuer à dérouler mais il est bloqué par un nœud bien serré.

Je l’abandonne là. La suite est une vaste galerie qui suit toujours le même axe et la visibilité est bonne. Mais c’était sans compter sur les mesquineries de Mélusine. 10 mètres après, la galerie se divise en trois branches plus modestes. Je prends celle du milieu. Je n’ai pas fait 50 mètres que la galerie change complètement de forme. La largeur doit atteindre 10 mètres mais le plafond est bien descendu. On dirait un gros laminoir où le sol est jonché de blocs détachés du plafond. Le contraste avec le reste du siphon qui ressemble à un gros tube serpentant est troublant. En limite d’autonomie sur ma redondance, je
fais demi-tour. J’ai largement assez reconnu de galerie à topographier pour la prochaine fois…

Retour rapide vers la zone des 400 mètres. Pourtant, malgré le scooter, je sens monter l’essoufflement : le coup de chaud, le stress, l’irrépressible envie d’arracher le masque et l’embout pour mieux ventiler. Mais le passage sur circuit ouvert n’est pas sans conséquence. Pas de retour possible sur la boucle dans les conditions présentes. Je contrôle l’ensemble des paramètres, le PPO2 est bonne, mon diluant est très optimiste avec 35% de He2. Je purge ma boucle avec un bol de diluant frais. Ça va mieux, mais c’est de courte durée. L’hyperventilation reprend. Cette fois-ci, je stoppe mon palmage, je ralentis le scooter, je mets de l’air dans la combinaison et je vais raser les plafonds pour diminuer la profondeur. Les symptômes disparaissent. Arrivé à 400 mètres, tout va bien. Nouveau contrôle complet : RAS. Je démarre le relevé. Les visée sont longues d’un méandre à l’autre. Je suis vite aux 200 mètres. Rangement, récupération de tout le matériel et retour surface avec quelques paliers qui passeront par un retour à la palme pépère. La plongée aura finalement durée 2 heures au lieu des 3 prévues.

Tout le monde est déjà de retour de quelques pérégrinations dans d’infâmes galeries boueuses autour du S2. Je reconditionne le matériel en l’enlevant et les kits partent dès qu’ils sont pleins. Le retour est calme. Concentré sur chaque pas, peu de mots s’échangent. Mais une fois dehors avec une bonne bière fraiche, les langues redeviennent loquaces. Et que dire des grillades et spécialités de chacun…

Porteurs :
– Véronique Persy
– Jean-Yves Boschi
– Serge Fulcrand
– Serge Fernandez
– Corinne ?
– Christian Kupiec
– François Parrini
– Aurélien Etienne
– Hubert Camus
– Guilhem Maistre
– Philippe Bertochio
– Didier Cailhol et sa famille

Plongeur :
– Philippe Bertochio